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énergique avait une expression de calme et de bonheur qui le transformait complètement. Ses allures d’aventurier, jointes au prestige du malheur, lui donnaient ce cachet romanesque qui plaît à la jeunesse.

Au milieu de ces événements, Colette oubliait William Pody, son riche fiancé, et sa satisfaction fut médiocre lorsqu’elle le vit arriver à Greenish.

Elle travaillait près de la fenêtre de son cottage et ne fit pas semblant de le voir venir. Elle pensait à la rencontre de la veille, à la joie de Tomy, à ses témoignages de reconnaissance et de dévouement.

— Quel est donc le travail qui vous absorbe à ce point, ma chère Colette ? dit William d’une voix empreinte d’ironie.

Le gracieux visage de la jeune fille perdit le rayonnement de joie intérieure qui l’animait.

— Pardon, William, dit-elle en s’efforçant de sourire, vous trouvez que je ne vous fais pas assez d’honneur ?

Le jeune homme fronça les sourcils.

— Je ne demande pas d’honneur, Colette, répliqua-t-il, mais il me semble qu’un fiancé devrait être reçu avec plus d’empressement.

Un mois plus tôt la jeune fille eût accueilli ces remontrances par un éclat de rire, mais Colette était devenue sérieuse. William remarqua ce changement, il avait entendu parler au village des dernières aventures auxquelles se trouvait mêlé le nom de sa fiancée, et il était très mécontent.

— À quoi pensiez-vous donc tout-à-l’heure ? reprit-il.

— Je n’en sais rien.

— Vous paraissiez préoccupée ; faisiez-vous le plan d’une conspiration nouvelle ? car vous conspirez, paraît-il ?

— D’où vous viennent ces folles idées, William ? Un propos comme celui-là suffirait pour me compromettre.

— Soyez tranquille, ma chère amie, je serais désolé