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curé ne s’était jeté entre les combattants afin d’arrêter l’effusion du sang.

La voix vénérée du pasteur fut écoutée par ces hommes sauvages qui conservaient encore, malgré leurs égarements, le respect de la religion catholique et du prêtre.

Quand le calme fut rétabli, les constables meurtris, blessés, couverts de boue, virent que leur prisonnier leur avait été enlevé ; la potence était renversée et la foule, revenue de sa frayeur, riait et se félicitait du résultat de l’aventure.

Le chef humilié rallia ses hommes ; comprenant que la poursuite était inutile, les constables, la tête basse, traversèrent le village afin de rendre compte au bailli de ce qui venait de se passer.

Colette, pâle et tremblante, n’avait pas quitté le lieu de l’exécution ; son fidèle Jack lui avait appris que toutes les dispositions étaient prises, mais son anxiété grandissait à mesure qu’approchait le moment fatal. Si le secours allait arriver trop tard ? Non, son plan avait parfaitement réussi, grâce au dévouement de Clary. La jeune fille était restée impassible pendant la durée de la lutte, elle souriait maintenant en voyant défiler piteusement les constables vaincus. Un d’eux, celui que l’avant-veille elle avait si bien enveloppé dans le filet, lui dit en passant :

— Tu peux te réjouir, belle Colette, ton amoureux a échappé, mais nous le rattraperons.

La jeune fille haussa les épaules.

— Je suis sûr que tu es pour quelque chose dans le complot, reprit le soldat furieux, je ne sais ce qui m’empêche de t’arrêter.

— Faites-le, je ne vous crains pas.

Le constable posa la main sur la jeune fille.

— Nous n’avons pas d’ordre, dit le chef, c’est aux