Page:Arvor - Dent pour dent, scènes irlandaises, 1906.djvu/80

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 78 —

ments que nous racontons, Clary vivait satisfait, dans son humble cottage, près de sa mère et de sa sœur Alice, âgée de dix-huit ans et douée d’une grande beauté.

Le garde-chasse du landlord, fort épris de la jeune fille, la rechercha en mariage, mais celle-ci refusa obstinément d’abjurer sa religion et d’épouser un ennemi des siens.

Furieux de cet affront, l’Anglais jura de se venger ; usant de son influence près du bailli, il obtint l’expulsion de ces gens qui l’avaient repoussé. Par une froide nuit d’hiver la pauvre famille fut jetée dehors sans qu’il lui fût permis d’emporter un seul vêtement pour se couvrir.

Alice, d’une santé délicate, ne supporta pas le froid, elle tomba malade et le chagrin acheva de la tuer ; sa mère ne lui survécut pas. Clary, fou de désespoir, n’avait plus ni famille ni asile.

Un jour le garde-chasse fut trouvé dans la forêt blessé de plusieurs coups de poignard. On chercha l’assassin, les soupçons se portèrent sur Clary, mais il s’était réfugié dans la montagne.

Colette avait connu Clary et sa sœur ; l’année précédente elle avait retrouvé le jeune homme dans une circonstance où, aidé de deux autres montagnards, il la préserva d’un grand danger.

Clary fut frappé de la beauté de Colette et, depuis, sa pensée revenait souvent sur les incidents de cette rencontre. Il n’avait pas été peu surpris de voir la jeune fille ce jour-là chez la vieille Jane et la sympathie qu’elle lui inspirait déjà s’était accrue.

Colette ignorait les sentiments du jeune homme, mais elle ne doutait pas qu’il ne tînt sa promesse ; quelque chose au fond du cœur lui disait qu’elle avait en Clary un ami dévoué.