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Ceux-ci levèrent la tête.

— Colette, a raison, fit le jeune garçon, si j’étais un homme, moi…

Un des buveurs, frappant amicalement sur l’épaule de Jack, lui dit d’une voix douce qui contrastait singulièrement avec son costume sauvage :

— Eh bien, enfant, que ferais-tu si tu étais un homme ?

Jack, un instant déconcerté, reprit résolûment.

— Je prendrais avec moi dix montagnards comme vous et j’enlèverais le prisonnier à la barbe des constables.

C’était le plan de Colette que le jeune garçon exprimait ainsi.

— Tu es un brave enfant, Jack, dit la jeune fille émue, que n’as-tu vingt ans !

Celui qui avait parlé à Jack s’approcha de Colette.

— Ce que Jack ferait, ne nous croyez-vous pas capable de le faire ?

Le montagnard avait enlevé son large chapeau et se présenta le visage découvert. C’était un jeune homme de vingt-cinq ans ; ses cheveux noirs, son teint bruni, ses yeux brillants et doux, ses traits accentués lui donnaient un caractère de mâle beauté qui frappait vivement ; sa physionomie était triste, il ne semblait pas fait pour l’existence qu’il menait. Dans une autre patrie, il eût été un citoyen honnête, intelligent, fidèle à son devoir ; en Irlande, une odieuse oppression l’avait poussé à une vie dangereuse.

— Clary ! fit Colette en reconnaissant le jeune homme, j’ai confiance, vous sauverez Tomy.

Le montagnard se penchant vers la jeune fille, lui dit très bas :

— C’est votre fiancé ?

— Non, répondit Colette en rougissant.

— Est-ce pour nous demander un semblable coup de