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geuse ; leurs pieds enfonçaient dans des ajoncs sous, lesquels se cachaient des flaques d’eau fétide ; habitués au pays, ils se dirigeaient sûrement au milieu de ces abîmes de boue et de vase où un faux pas pouvait les engloutir. Les premiers rayons du jour commençaient à percer l’épaisse couche de brouillard, le froid était un peu moins intense.

Au sortir des tourbières ou marchait sur un gazon court et vert, parsemé de trèfles et de fougères, on était au pied des montagnes. Adossée à un groupe de rochers, une hutte formée de terre et de chaume apparaissait dans le lointain.

À cent pas de la cabane, Colette s’arrêta.

— Attendez-moi ici, dit-elle, je préfère me présenter seule.

La jeune fille continua à marcher. Un jeune garçon d’une douzaine d’années se tenait sur le seuil de la pauvre hutte.

— C’est Colette, cria-t-il tout joyeux, en accourant vers elle.

— Bonjour, Jack, mon ami, il y a du monde chez toi ? On prend des précautions.

— On ne savait pas que ce fût vous, Colette ; à cette heure matinale, les visites ne sont pas toujours rassurantes.

— Jack, tu vas me rendre un service ?

— Parlez, j’obéirai, dit le jeune garçon simplement.

— Puis-je compter sur ton dévouement ?

— N’avez-vous pas soigné ma vieille mère ? Ne nous avez-vous pas maintes fois nourris et secourus ? N’est-ce pas à vous que nous devons d’avoir souvent échappé aux constables ?

— Bien, Jack, tu as un bon cœur. Écoute ce que j’ai à te dire.

Elle parla quelques minutes à voix basse, le jeune garçon baissa la tête en pâlissant.