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il vit la jeune fille arrêtée avec quelques amis. Tomy sauta lestement à terre et, prenant son poney par la bride, il se dirigea vers elle.

— Bonjour, Colette, dit-il, il y a longtemps que je ne vous ai vue.

— C’est vrai, Tomy. Pourquoi n’êtes-vous pas venu à la noce de Patrick Yenky ?

— Je ne l’ai pas pu, fit Tomy en rougissant.

Colette eut un sourire de pitié et ses yeux se portèrent sur le pauvre accoutrement du jeune homme. Celui-ci regardait aussi la toilette de la jeune fille, jamais il ne l’avait vue habillée avec tant de luxe.

— Que vous êtes belle, Colette ! fit-il d’un ton amer.

— Mais sans doute, pourquoi ne le serais-je pas ?

— Nulle jeune fille dans la paroisse ne peut rivaliser avec vous.

— C’est ce que je désire.

— Vous êtes bien changée, Colette.

— En quoi suis-je changée ? Est-ce parce que mon père m’a apporté de Cork le joli costume que je porte.

— Votre père ?

— Oui, certainement.

Tomy secoua la tête avec découragement, il pensa que le mariage de Colette avec William était décidé, il n’y avait donc plus à espérer.

— Vous allez au marché, Colette ? demanda-t-il.

— Non, j’en reviens.

— Voulez-vous me permettre de vous accompagner ?

— Je ne peux pas vous en empêcher.

La réponse n’était point encourageante, Tomy voulait cependant s’expliquer, car dans quelques jours il avait une grave détermination à prendre.

Il resta longtemps silencieux, tourmentant la bride de son poney. Colette, oubliant presque sa présence, se mit à chanter.