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en ouvrant la porte, maintenant bonne nuit, il est temps de rentrer chez vous.

— Je n’ai pas un mauvais cœur, moi, répétait le jeune garçon rouge de colère, j’ai six frères et sœurs et je n’en jetterais aucun dans l’étang.

Tomy devint blême ; poussant James dehors, il lui dit :

— On n’abuse pas ainsi de la patience des gens, va-t’en.

Le paddy referma la porte et poussa les deux verrous.

— Vous êtes de méchantes gens, cria James à travers la serrure, cela vous portera malheur. J’étais là, Tomy, oui, j’y étais.

— Que dit-il ? demanda la mère.

— Je ne le comprends pas, le garçon est un peu innocent.

— Ah ! bien, oui, reprit la fermière, donner mon argent pour nous avoir rendu cette petite chenille-là !

— L’argent est trop rare chez nous, ajouta Susy.

— On aurait pu au moins le remercier, dit William.

Une heure plus tard la famille était couchée. Le père ne dormait pas, il pensait qu’il ne pourrait payer son fermage et qu’il serait expulsé. Tomy ne parvenait pas non plus à fermer la paupière ; les paroles de James l’effrayaient peu, celui-ci n’avait aucune preuve contre lui ; d’ailleurs Ketty était sauvée ; ce qui le tourmentait maintenant c’était le souvenir de la scène dont il avait été témoin entre Colette et William.

Le jour le surprit dans ses douloureuses réflexions. Il se leva et s’habilla à la hâte, il lui tardait de sortir, d’être seul et de respirer l’air pur de la campagne. Avant de quitter la maison, il jeta un regard sur la couche où reposait Ketty ; elle avait la fièvre.

— Susy, dit le jeune homme, prépare de la tisane pour la petite.

Sa sœur le regarda surprise.