Page:Arvor - Dent pour dent, scènes irlandaises, 1906.djvu/29

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 27 —

— Vous ne m’aimez donc pas, Colette ?

La jeune fille, dégageant sa main de celle de William, s’éloigna en chantant :

J’aime l’oiseau qui s’envole,
Et les fleura de la prairie,
Le beau papillon frivole,
Glissant sur l’herbe fleurie.

William fit un geste d’impatience. Tomy s’était relevé pour se rapprocher de l’endroit où se trouvaient maintenant les deux jeunes gens.

— Colette, reprit William, dois-je croire que la demande d’un autre serait mieux accueillie que la mienne ?

La jeune fille répondit par un nouvel éclat de rire perlé qui l’irrita davantage.

— Colette, insista-t-il, écouteriez-vous mieux Tomy Podgey ?

— Ce gueux de Tomy Podgey, fit Colette en riant de plus belle.

— Cependant !

— Vous êtes fou, mon pauvre William, votre jalousie vous rend insensé. J’ai parlé à Tomy comme à un ancien compagnon d’enfance, mais je n’ai jamais pensé à l’épouser. Le pauvre garçon est loin d’y songer lui-même et, y songerait-il, il ne le pourrait pas.

— C’est certain, quand on a après soi sept frères ou sœurs, y compris ce petit garçon manqué qui a achevé de leur faire perdre la tête à tous, on ne peut se créer une famille nouvelle.

— Tomy était bon enfant autrefois, reprit la jeune fille, son malheur l’a rendu triste et farouche, je ne sais pourquoi il n’est pas venu aujourd’hui.

— On dit, fit ironiquement William, qu’après avoir peu à peu vendu leur mobilier, les Podgey envoient à tour de rang leurs habits chez le revendeur.