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curité, sans lendemain, vit misérablement sur un sol qu’il arrose de ses sueurs et d’où une loi barbare peut le chasser à tout moment.

L’Angleterre applique son joug de fer sur cette île-sœur qu’elle a de tout temps traitée avec la tendresse que témoignait à Ketty sa famille.

L’Irlande, persécutée pour sa constance dans la foi catholique, a gémi des siècles, essayant vainement de reconquérir son droit de vivre ; la révolution s’infiltrant parmi ces populations ulcérées, couve depuis longtemps et, si on n’apporte au mal un efficace et prompt remède, un cataclysme se prépare, menaçant l’existence de ce royaume, asile de tous les sectaires chassés de leur pays et qui usent maintenant si habilement des progrès de la science moderne.

Tomy cherchait donc un moyen de gagner sa vie et ne le trouvait pas.

Lady Walwich n’avait pas reparu depuis le jour de la naissance de Ketty, elle avait sans doute trouvé ailleurs l’héritier désiré et n’avait pas pensé un instant aux pauvres gens dont ses promesse avaient à jamais troublé le repos. Les Anglais sont, pour la plupart, froidement égoïstes, leur générosité tant vantée n’est souvent qu’apparente ; ils prodiguent follement l’or pour satisfaire une fantaisie ou se donner le mérite d’une action d’éclat, mais le vrai désintéressement, la charité affectueuse et cachée sont des vertus essentiellement catholiques, pratiquées seulement par ceux qui s’inspirent de cette parole du Sauveur : « Aimez-vous les uns les autres. »

Depuis un mois, Tomy travaillait à titre de manœuvre à la reconstruction d’un cottage détruit par un incendie. C’était à quatre milles de chez lui ; le matin et le soir, il pouvait encore aider son père et ses journées, bien que peu payées, donnaient cependant quelques ressources à la famille.