Nous épargnons votre vieillesse, n’entravez pas l’action de la justice, en permettant aux misérables que nous poursuivons de se soustraire à nos recherches.
— Pour quelques coupables que d’innocents sacrifiés, répondit le solitaire sans abaisser la trompe qu’effleuraient ses lèvres.
William Pody tremblait de voir sa vengeance lui échapper, il savait qu’il y avait dans la montagne des retraites inaccessibles, il fallait surprendre les bandits. Une ardente colère remplissait son âme et troublait son cerveau ; il dirigea son revolver sur le vieillard en s’écriant :
— Malheur à vous si vous nous trahissez !
— Qui parle de trahison ? William Pody, que mon sang retombe sur vous.
Réunissant ses dernières forces, le vieillard lança dans les airs les sons vibrants qui, d’échos en échos, jetèrent l’alarme dans la montagne.
— Malédiction ! hurla William Pody en déchargeant son arme.
Le solitaire s’affaissa lentement comme un de ces troncs centenaires qu’abat la hache du bûcheron.
Les soldats reculèrent d’horreur à la vue de l’auguste vieillard gisant inanimé sur le sol, sa longue barbe blanche couverte de sang. Cette existence d’un siècle venait d’être brisée par une main sacrilège ; le reste de vie qui animait la vénérable victime avait été généreusement offert pour le salut des proscrits innocents que le solitaire aimait et dont il était profondément respecté.
— J’avais défendu qu’on tirât sans mon ordre, fit l’officier sévèrement ; Pody, nous ne sommes pas ici pour accomplir vos vengeances, je ne veux pas commander à des assassins.
William consterné du crime qu’il venait de commet-