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dans le calme, l’explosion d’une vie nouvelle. Les flocons de neige n’obscurcissaient plus l’air, le givre ne faisait plus fléchir les branches grelottantes sous la bise glacée, la blanche gelée des nuits fondait sous les rayons du soleil.

À cette époque de l’année, on assiste à un merveilleux travail dans la nature, les semences confiées à la terre germent de toutes parts, l’herbe croît dans les prairies, les arbres se couvrent de bourgeons suivis bientôt d’un tendre feuillage ; les buissons se peuplent de joyeux chanteurs, les ruisseaux coulent plus gaiement entre leurs rives verdoyantes, chaque jour la campagne se pare d’une grâce nouvelle ; ce n’est pas encore le printemps, mais c’en est l’espérance prochaine.

La montagne avait pris une teinte plus riante, la mousse couvrait le pied des rocs arides, les hautes herbes s’agitaient comme de vertes aiguilles sur les bords du lac, les cascades, grossies par les pluies récentes, jaillissaient en gerbes de cristal. En Irlande, les forêts et les prairies sont d’un vert inconnu au reste du monde et les grottes, les vallées, les chutes d’eau, les échos et les montagnes de l’Émeraude des mers offrent des beautés naturelles qui, si elles étaient visités, deviendraient aussi célèbres que celles de la Suisse.

Par une belle matinée, la famille Podgey, Colette et quelques montagnards se dirigèrent vers le village de C… L’air était pur et frais, tout imprégné des premières senteurs de la brise printanière. Colette et Tomy marchaient ensemble dans ces sentiers qui ne leur avaient jamais paru si beaux, le rayonnement de leur bonheur projetait autour d’eux les reflets d’une joie nouvelle. De la montagne à la mer il y avait de ravissants passages que le printemps rendait plus charmants.

— Qu’il ferait bon de vivre là, Tomy, dit Colette, si