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blaient ce soir-là favoriser le sinistre complot. Les sentiers de la montagne, raffermis par quelques jours secs, étaient praticables ; les bandits marchaient en silence, le bruit de leurs pas résonnait lourdement et réveillait les échos endormis ; quelques oiseaux nocturnes, troublés dans leur solitude, poussaient en s’enfuyant des cris aigus ; les cascades, grossies par les premières fontes de neige, roulaient comme la vie humaine leurs flots ininterrompus.

La petite troupe était sortie de la montagne, elle traversa les tourbières et atteignit la route de Greenish à Cork ; de là, elle gagna un chemin qui menait à l’ouverture d’un bois ; elle s’embusqua en cet endroit et attendit.

— Mon Dieu, murmurait Tomy à l’oreille de Clary, s’il pouvait passer par un autre côté.

— Le chef est sûr de ce qu’il fait, répliqua le jeune homme, ce chemin mène à l’entrée du parc.

— « C’est affreux ! dit Tomy. Oh ! si j’avais su, je ne serais pas revenu ; je partirai, je ne peux vivre au milieu d’assassins.

— Silence ! fit Gaspard, j’entends le bruit lointain de plusieurs chevaux ; tenez-vous prêts à m’obéir.

Le bruit se rapprochait insensiblement, il devint plus distinct, enfin deux cavaliers apparurent venant assez vite, car il était tard ; c’était le landlord et un domestique.

Une double détonation se fît entendre, les deux chevaux roulèrent dans la poussière ; leurs maîtres qui n’étaient pas atteints se dégagèrent vivement, mais avant qu’ils pussent se servir de leurs armes, des mains vigoureuses s’étaient emparées d’eux ; malgré leur résistance, ils furent enlevés et transportés dans l’intérieur du bois, à l’entrée d’une clairière.

Le chef fît signe à ses hommes de se ranger en cercle ; il prit place au centre ; en face de lui était le land-