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du concert de ses gémissements. Tout un peuple de pauvres, c’était là un spectacle inconnu au monde ; il était réservé à l’Irlande de l’offrir. »

Il n’existe pas dans ce pays de classe moyenne. Pendant de longs siècles, les confiscations et la rapacité anglaise lui ont tout enlevé pour ne laisser subsister que le prolétariat. L’Irlande, aujourd’hui, n’appartient plus aux Irlandais, elle est devenue la proie de quelques lords anglais qui vont dévorer en Angleterre ou sur le continent tout ce que le sol irlandais peut produire, et ne sont jamais en rapport avec les malheureux qui dépendent d’eux.

L’Irlande n’ayant pas de classe moyenne ne peut avoir d’industrie. Qui lui achèterait ses produits ? Ce ne seraient pas les affamés dont nous avons dépeint la situation.

Une loi, empreinte d’un sentiment de bienveillance qui fait honneur au ministre qui l’a conçue, M. Gladstone, vient enfin d’être votée en faveur de la population agricole d’Irlande. Si cette loi est loyalement appliquée, elle mettra un terme aux maux de ce malheureux pays et rendra efficaces les mesures libérales déjà prises à l’égard de l’Irlande. Mais il est à craindre que la révolution, exploitant les souffrances réelles et la défiance hélas ! trop justifiée de ce peuple si longtemps persécuté et déçu, n’entrave l’exécution de la législation nouvelle.

Partout, en effet, depuis un siècle, l’esprit révolutionnaire, sous le spécieux prétexte de détruire les abus et de rendre la situation des peuples meilleure, arrête les réformes utiles et aggrave les maux qu’il prétend guérir.

Que veut la révolution ? Effacer de l’âme humaine la notion de Dieu et abolir dans les sociétés le principe de l’autorité sur lequel repose la stabilité indispensable à une nation qui veut vivre.