Page:Arvor - Dent pour dent, scènes irlandaises, 1906.djvu/152

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 150 —

tiez de ma part à vos compagnons des poissons comme vous n’en pêchez point dans vos lacs.

Une heure plus tard les proscrits prirent place autour de la grande table qui était pour eux somptueusement servie ; l’excellente soupe leur sembla savoureuse, un plat de pommes de terre fumantes, plusieurs poisons bouillis, du lait, des fromages, du pain et des galettes d’avoine composaient le repas.

Gibs servait d’intermédiaire entre les montagnards et les capitaines des navires qui débarquaient leurs marchandises en contrebande ; les profits qu’il retirait de ce commerce et le produit de sa pêche lui donnaient les moyens de vivre largement ; la visite des contrebandiers était aussi une agréable diversion à sa vie solitaire, il se montrait enchanté de les revoir.

Le bâtiment attendu ne fut signalé que le troisième jour ; Gibs mit sa barque à flot et alla au-devant de lui : le capitaine, rassuré sur l’état de la côte, aborda dans la petite anse qui s’arrondissait devant l’habitation du pêcheur ; les proscrits opérèrent rapidement le débarquement des barils d’alcool ; le capitaine, obligé attendre, pour repartir, la prochaine marée, accepte l’hospitalité de Gibs à la fille duquel il offrit quelques objets d’habillement. Lizzy les reçut avec joie car, même sur une côte ignorée, les femmes aiment la parure et le luxe. Elle les mit de suite pour faire honneur au capitaine et aussi peut-être afin de paraître plus jolie aux hôtes de son père.

C’était une belle fille que Lizzy, de plus elle s’occupait du ménage avec l’activité d’une fée ; levée dès l’aurore, elle allait les jours de marché à la ville la plus proche vendre le poisson, elle aidait sa mère à préparer les repas, entretenait les filets de son père, faisant ensuite le pain et des fromages exquis.

Tomy admirait l’air de bonheur qui épanouissait tous les visages.