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ne poussez pas à bout ma patience, car, sur mon âme ! elle aurait un terme.

— Des menaces maintenant, fit Colette ; agissez comme il vous plaira, William. Je ne vous ai offensé en rien, je ne comprends pas votre colère ; épargnez seulement ma famille, quant à moi, je suis résignée à tout.

Le jeune homme frappa du pied violemment.

— Me croyez-vous capable de vous nuire, Colette ? Dites, pensez-vous que William Pody soit homme à aller livrer à la justice une fiancée qu’il aime et des parents qui ne lui font que du bien ? Je ne suis pas un misérable, un vagabond, un bandit. Quoiqu’il puisse arriver, Colette, je vous épargnerai toujours, ma vengeance saura où frapper.

— Que voulez-vous dire, reprit la jeune fille.

— Croyez-vous que j’ignore l’obstacle qui s’oppose à notre bonheur ?

— Oh ! William, vous vous abusez ; d’ailleurs je ne reverrai plus Tomy Podgey.

— Je le désire pour lui. Colette, retenez bien ces paroles : j’ai en mes mains la vie de Tomy, s’il essaie de vous revoir, il aura signé son arrêt de mort.

William se leva, prit son chapeau et quitta sa fiancée.

Colette resta atterrée ; son antipathie pour William, dont elle connaissait la nature soupçonneuse, s’accentuait de plus en plus.

— Que je serai malheureuse avec lui ! pensait-elle : j’aimerais mieux épouser un pauvre paddy, je préférerais même quitter l’Irlande, aller vivre dans une pays où l’on ne serait pas sans cesse placé entre la crainte d’une dénonciation et un caprice du landlord.

La nuit suivante, Colette rêva qu’elle s’embarquait sur un grand navire et qu’après une belle traversée, elle arrivait dans une colonie superbe où tout était verdure, fraîcheur et fleurs. Un beau jeune homme se te-