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rompant à temps sa femme ; nous vous remercions d’un honneur si grand pour nous.

— Il ne s’agit pas de cela, Willy Podgey, chacun cherche son intérêt en ce monde, vous ne me devez aucune reconnaissance. J’ai entendu dire : la famille Podgey est la plus belle du pays, les enfants sont sains, bien portants et intelligents.

— Ça c’est vrai.

— Je n’ai pas besoin que vous confirmiez mes paroles, je n’aime point qu’on m’interrompe.

— Que milady me pardonne.

— Cela suffit, ces propos inutiles me fatiguent ; je cherche un héritier, si vous avez un garçon, je l’adopte. Je l’appellerai Édouard comme le fils que j’ai perdu, il sera riche et heureux.

— Ah ! milady, fit Jenny toute joyeuse à la pensée de devenir la mère d’un grand seigneur, que le ciel vous bénisse.

— Bien, bien, je n’aime pas les remerciements, interrompit la dame. De ce jour je me charge de la famille de mon Édouard, rien ne vous manquera, je ferai une situation à chacun de vos enfants et vous, Willy, je vous confierai l’exploitation d’une ferme importante sur mon domaine. Quand fini votre bail ?

— Hélas ! milady, dans quinze jours on nous expulsera, j’ai deux termes en retard et je ne puis payer.

Et le paddy raconta la scène que nous connaissons.

— Le bailli de votre maître fait son devoir, je chasserais le mien s’il agissait autrement. Si on se laissait apitoyer par les lamentations de ses tenanciers, on n’en finirait pas, tous les revenus iraient au diable !… Demain on vous remettra de ma part de quoi payer vos deux termes, car le landlord est dans son droit, il aurait raison de vous faire expulser.

Jenny vint en versant des larmes de joie tomber aux pieds de lady Walwich.