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Le jeune garçon hésitait à faire cette consommation inutile, mais le domestique lui donna l’exemple, il s’exécuta d’assez mauvaise grâce.

— Chassez ces volailles, fit encore milady.

Le cocher lança un ou deux vigoureux coup de fouet aux oies qui s’enfuirent en poussant des jacassements affolés.

La dame daigna enfin descendre et pénétra dans la pauvre chaumière.

— Ne fermez pas la porte, dit-elle, l’air est suffocant.

Jenny lui présenta le meilleur siège de l’appartement et la petite Gib vint déposer à ses pieds un escabeau.

L’étrangère se dépouilla d’une partie de ses fourrures qu’elle remit au laquais, leva son voile et il fut impossible de l’examiner.

Elle était grande, sèche, osseuse ; son visage dur, sévère ; ses cheveux d’une nuance fauve ne lui donnaient pas un abord agréable ; il y avait dans sa personne la même brusquerie que dans sa voix. Elle ne devait pas être âgée de plus de quarante ans.

— Milady, commença timidement Jenny, j’aurais voulu vous recevoir d’une manière plus digne de votre rang, mais nous ne sommes que de pauvres gens.

— Je le sais, répliqua milady, ce n’est pas pour l’apprendre que je suis venue ici.

Le début était peu encourageant.

Podgey et sa famille gardèrent le silence.

— Je suis lady Walwich, reprit l’étrangère.

Le paddy s’inclina profondément devant sa visiteuse qui était, il le savait maintenant, une des plus riches propriétaires du pays ; elle habitait à six milles de là un superbe château.

— Willy Podgey, dit-elle, j’ai entendu vanter votre probité, votre conduite et la bonne tenue de votre famille. Approchez, enfants, je veux vous voir.

L’étrangère fit signe à Willy de les lui présenter. Le