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X

LE CENTENAIRE DE LA MONTAGNE


Combien de temps resta-t-il en cet état ! Quand il reprit ses sens, il se crut en proie à un cauchemar horrible.

La faible lumière d’une lanterne sourde éclairait le sentier désert et projetait sur la neige des reflets vacillants ; quelques chênes rabougris élevaient leurs troncs noueux, garnis de branches bizarrement déchiquetées : William crut voir une troupe de démons accourant à sa rencontre ; plusieurs coups de sifflet traversèrent la montagne comme un signal terrible, l’infortuné pensait toucher à sa dernière heure.

La lumière glissait mystérieusement sur le sol, le gémissements du vent redoublaient, les génies malfaisants qui, dit-on, peuplent les montagnes agitaient convulsivement leurs bras décharnés ; du sein de la nuit surgit une apparition étrange. Elle avait une forme humaine ; une grande tunique en peaux de chèvre enveloppait son corps, une longue barbe blanche tombait jusqu’à sa ceinture, ses cheveux d’argent couvraient ses larges épaules ; le vieillard avait un front imposant, un regard inspiré, un visage pâle et vénérable ; il étendit vers le jeune homme une main osseuse ; à ce froid contact, William crut sentir l’approche du spectre de la