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II


Il était environ six heures. Le soleil était ardent encore, mais une ombre douce et verdâtre montait déjà du jardin. L’atmosphère était imprégnée de lumière, de calme et de chaleur.

Maria Ivanowna préparait des confitures, et une odeur forte et agréable de sucre bouillant et de framboise se répandait sous les feuillages des tilleuls.

Depuis le matin, Sanine s’occupait des parterres, essayant de relever les fleurs flétries par la poussière et l’ardeur du soleil.

— Tu ferais mieux d’arracher d’abord les mauvaises herbes, lui fit remarquer Maria Ivanowna, qui le regardait de temps en temps à travers la vapeur bleuâtre et vacillante du brasier, adresse-toi à Grounca, elle le fera.

Sanine leva vers elle son visage gai et couvert de sueur.

— Pourquoi faire, dit-il, secouant les cheveux qui se collaient à son front, qu’elles croissent à leur aise… j’aime toute verdure.

— Quel original tu fais ! répliqua la mère haussant débonnairement les épaules. Pourtant ce qu’il venait de dire lui avait fait plaisir.