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XIII

DEUX NOTES

I. — LES FRÈRES MARX

Le premier film des Marx Brothers que nous ayons vu ici : Animal Crackers, m’est apparu, et il a été regardé par tout le monde comme une chose extraordinaire, comme la libération par le moyen de l’écran d’une magie particulière que les rapports coutumiers des mots et des images ne révèlent d’habitude pas, et s’il est un état caractérisé, un degré poétique distinct de l’esprit qui se puisse appeler surréalisme, Animal Crackers y participait entièrement.

Dire en quoi cette sorte de magie consiste est difficile, c’est en tout cas quelque chose qui n’est pas spécifiquement cinématographique peut-être, mais qui n’appartient pas non plus au théâtre et dont seuls certains poèmes surréalistes réussis, s’il en était, pourraient donner une idée. La qualité poétique d’un film comme Animal Crackers pourrait répondre à la définition de l’humour, si ce mot n’avait depuis longtemps perdu son sens de libération intégrale, de déchirement de toute réalité dans l’esprit.