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Dans le second cas, au contraire, dans celui où le produit est fabriqué en grand et gardé long-temps, comme cela arrive pour les fromages de longue garde, tels que les fromages de Gruyères, de Chester, de Parmesan, de Hollande, de Roquefort, d’Auvergne, alors les qualités particulières au lait d’un animal sont contre-balancées par celles du lait de tous les autres animaux, et il s’établit sous ce rapport une qualité moyenne de lait qui tend à donner au produit fabriqué les mêmes qualités, à des différences imperceptibles près, si la fabrication est bien la même.

De plus, la longue et lente fermentation qui s’établit pendant tout le temps que dure la garde des fromages, en faisant subir des altérations profondes au principe du fromage, tend à faire disparaître les propriétés spécifiques qui distinguent les uns des autres les fromages frais.

Enfin, certaines manipulations prolongées, telles que la division extrême du caillé, sa cuisson lente et à une haute température, ensuite l’addition de quelques substances sapides et odorantes, tendent à produire le même résultat, c’est à dire à rendre tous ces fromages de plus en plus identiques, si la fabrication est bien la même.

L’expérience, d’ailleurs, est là pour confirmer ces données.

On disait qu’on ne pouvait fabriquer des fromages de Gruyères qu’en Suisse, parce qu’il fallait les races de vaches et les pâturages des montagnes de la Suisse, pour avoir ces mêmes fromages. Maintenant on fabrique ces fromages dans le Jura, avec les races du Jura nourries dans ces mêmes pâturages du Jura ; on en fabrique en Lorraine, on en fabrique en Normandie, on en fabrique sur les bords de la Garonne.

On consomme en Angleterre cinquante fois plus de fromage de Chester que le comté de Chester n’en produit ;