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charger de marchandises en retour. Ce moyen de transport, dont on est redevable à M. Delmas, a le double avantage d’économiser sur les frais par la facilité des retours, et de conserver beaucoup mieux les fromages que les anciennes corbeilles dans lesquelles il s’en écrasait toujours un onzième, et où le reste s’échauffait prodigieusement.

On prépare encore à Roquefort une matière exquise qui est connue sous le nom de crême de Roquefort ; elle est faite avec le lait une fois caillé et avant d’être broyé. Cet aliment délicieux ne souffre presque pas le transport ; il s’altère avec beaucoup de facilité et se dénature par une fermentation très prompte.

On prépare dans les caves de Roquefort, de la manière que nous venons de décrire, environ dix mille fromages par an ; ce qui fait un commerce de cinq à six cent mille fr.

Les diverses opérations par lesquelles on fait passer les fromages, et les phénomènes qu’ils nous présentent pendant leur séjour dans les caves, intéressent essentiellement et méritent une attention toute particulière.

La première de ces opérations est la salaison. On voit évidemment que la petite quantité de sel qu’on emploie ne produit d’autre effet que de faciliter et de mettre en jeu la fermentation ; c’est un vrai levain fermentatif dont les opérations subséquentes corrigent l’énergie, puisqu’on racle presque coup sur coup et à plusieurs reprises la portion de fromage qui en a été la plus imprégnée, et où la fermentation se développe avec le plus d’activité.

Ce levain de la fermentation est même absolument nécessaire d’après l’expérience elle-même, puisqu’il est de fait que les fromages non salés mis dans ces caves n’éprouvent aucune des altérations par où passent les autres[1] ; les viandes elles-mêmes s’y conservent sans se

  1. D’après cela, on pourrait essayer de retarder la fermenta-