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pour mieux en dégager le petit-lait : quelquefois aussi on assujettit un poids sur le fromage, afin de le mieux dessécher par une pression constante. On le laisse dans la forme environ douze heures, et on a l’attention de le tourner plusieurs fois, afin que la pression se communique partout, et que toute la masse s’égoutte et se dessèche également. Lorsque les fromages paraissent avoir rendu tout leur petit-lait, on les porte au séchoir, et on les place sur des planches les uns à côté des autres ; on les remue et on les retourne de temps en temps, pour qu’ils se dessèchent sans s’échauffer.

C’est surtout du soin apporté dans ces premières opérations, que dépend la qualité du fromage. Il arrive souvent que des fromages apportés de diverses bergeries dans les caves de Roquefort se trouvent de nature très différente, quoique fournis par des brebis nourries de la même manière. On observe fréquemment encore que des fromages sortis de la même bergerie, traités par les mêmes personnes, avec les mêmes soins, fournissent des qualités différentes. On n’a pu jusqu’ici se faire aucun principe sur les causes de ces variétés étonnantes ; mais je pense qu’on doit les chercher dans les premières opérations de la fabrication des fromages, et je crois pouvoir en assigner quelques unes, qui doivent produire naturellement des effets semblables.

La première de toutes m’a paru consister dans la nature toujours variable du levain ou présure : en effet, cette caillette de veau, très différente par sa nature, puisqu’elle dépend de l’altération si variable du lait dans l’estomac de l’animal, doit produire par elle-même une très grande variété d’effet. Le séjour plus ou moins long du lait dans l’estomac de ces animaux, la quantité plus ou moins considérable, le mélange plus ou moins parfait, plus au moins exact des sucs gastriques avec cet aliment, tout cela doit en varier et en modifier la composition ;