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l’évolution des mondes

de l’acide carbonique de l’atmosphère. Si donc toutes les plantes existantes étaient déposées dans des tourbières, l’air serait bientôt privé de tout son acide carbonique. Mais une fraction seulement de tout ce produit de la végétation est mis en réserve pour l’avenir. La majeure partie, et de beaucoup, retourne dans l’atmosphère par suite de combustion, de décomposition, de pourriture, etc.

Chamberlin raconte qu’il s’était posé, de concert avec cinq autres géologues américains, le problème de déterminer combien il faudrait de temps pour absorber, par la décomposition des roches, l’acide carbonique de l’atmosphère. Des procédés divers les conduisirent à des chiffres qui variaient de 5 000 à 18 000 années, avec une moyenne assez probable de 10 000 années. On peut admettre que la formation des tourbières demande une durée à peu près égale à celle prise par la décomposition des minéraux. L’ensemble des deux causes n’absorberait donc que le dixième environ de l’acide carbonique fourni par la combustion du charbon fossile à l’atmosphère dès aujourd’hui.

Or les deux causes d’absorption que nous venons d’indiquer sont les plus importantes qui, actuellement, produisent encore leurs effets. Il semble donc que la teneur en acide carbonique de l’air doive augmenter constamment et d’une façon assez sensible, par la consommation industrielle toujours croissante de la houille, du pétrole, etc., telle que la statistique nous l’indique. Cette progression augmentera encore avec l’emploi toujours croissant des combustibles minéraux.

La quantité totale d’acide carbonique qui se trouve emmagasinée dans les calcaires et les dolomies sédimentaires, est environ vingt cinq mille fois celle qui actuellement existe dans l’atmosphère. Elle a passé tout entière par l’air à l’état gazeux. Comme il faut environ 10 000 années pour que la désagrégation des roches absorbe une quantité équivalente à celle qui existe, si l’on suppose que cette désagrégation s’est toujours faite avec une égale intensité, on arrive à attribuer une durée de 250 mil-