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l’évolution des mondes

physiciens admirent que notre atmosphère joue le même rôle que le vitrage d’une serre. Le verre possède en effet cette propriété, de laisser passer la chaleur que nous appelons lumineuse, c’est-à dire celle qui est perceptible à nos yeux. La chaleur obscure, au contraire, celle que nous envoie un poêle ou une masse terrestre chaude, n’est pas susceptible de le traverser. La chaleur solaire est en majeure partie lumineuse, et le verre lui est transparent ; elle peut entrer dans une serre et y échauffer le sol. Mais celui-ci à son tour n’émet que des rayons obscurs qui ne peuvent traverser le vitrage. Celui-ci protège donc l’intérieur de la serre à peu près comme un pardessus empêche la perte de chaleur, par rayonnement, de notre corps. On connaît l’expérience de Langley. Il prit une caisse, protégée contre le rayonnement par une enveloppe de coton, mais qui, du côté exposé au soleil, avait une face munie d’un vitrage double. Il constata à l’intérieur de la caisse, lorsque le soleil y donnait, une température de 113 degrés, tandis que placée à l’ombre, le thermomètre n’y marquait que 14 à 15 degrés. Cet essai fut fait sur la montagne de Pike’s Peak, dans l’état du Colorado, qui a 4 200 mètres d’élévation. Il eut lieu le 9 septembre 1881 à 1 heure 40 minutes de l’après-midi, au moment où les rayons du soleil étaient d’une pénétration puissante.

Fourier et Pouillet admettaient donc que la ceinture atmosphérique que possède la terre a des propriétés qui se rapprochent de celles du verre, au point de vue de la perméabilité pour la chaleur. Cela fut reconnu exact par Tyndall. Les éléments de l’atmosphère qui sont causes de ce fait sont la vapeur d’eau et l’acide carbonique, qui l’un et l’autre n’existent qu’en faible partie dans l’air. L’ozone, les carbures d’hydrogène, produisent un effet analogue. Ces corps s’y trouvent cependant en si faible quantité qu’on n’en a pas encore tenu compte dans le calcul. Mais on a, ces temps derniers, fait des expériences très minutieuses sur la perméabilité à la chaleur, de l’acide carbonique et de la vapeur d’eau. À leur aide j’ai pu calculer