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l’évolution des mondes

très générale de voir. Il a été très rapide dans les dernières dizaines d’années, par suite de la grande extension de la doctrine de l’évolution, surtout depuis que l’immortel Charles Darwin l’a développée dans ses ouvrages.

Cette doctrine veut que les espèces s’accommodent, dans le cours des temps, aux conditions extérieures. Petit à petit leur variation peut devenir si grande, que l’on peut dire qu’une espèce nouvelle est procédée d’une plus ancienne. Cette opinion s’est même précisée et fortifiée dans ces derniers temps, par les travaux de De Vries. Nous pouvons dire aujourd’hui qu’il y a des cas où, sous nos yeux, il se crée des espèces nouvelles, provenant en quelque sorte brusquement des anciennes. Cette doctrine a pris le nom de théorie de la mutation.

Nous sommes donc aujourd’hui arrivés à penser que les êtres organisés vivants, que nous voyons autour de nous, proviennent tous d’organismes plus anciens, qui leur étaient passablement dissemblables, et dont nous trouvons des traces et des restes dans les dépôts géologiques antérieurs à nous, qui se sont déposés depuis des millions et des millions d’années. Ce point de vue permet de croire que tous les êtres organisés descendent d’un être vivant primitif, extrêmement simple, ou plus probablement de quelques individus peu nombreux. Comment cet être unique, ou ces rares organismes primitifs sont-ils venus à l’existence sur la terre, c’est ce qui reste encore à découvrir.

La conception la plus usuelle, qui était déjà celle des anciens, veut sans doute que des êtres inférieurs puissent naître sans provenir d’un germe. On avait remarqué que des êtres vivants très inférieurs, des larves, etc., se montraient sur de la viande corrompue : — Virgile en parle dans ses Géorgiques. Cette opinion s’est maintenue très universellement jusqu’au xviie siècle, où elle fut combattue par de nombreuses expériences, entre autres celles de Swammerdam et de Leeuwenhoek. La doctrine de la génération spontanée refleurit cepen-