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l’évolution des mondes

Mais si les vues de Clausius étaient exactes, cette mort calorifique devrait déjà s’être établie depuis les temps infinis que le monde existe, — ce qui n’est absolument pas le cas. Ou bien encore, pourra-t-on dire, l’existence du monde n’est pas infinie, mais il y a eu un commencement. Cela serait contraire à la première partie du principe de Clausius qui dit : l’énergie totale du monde est constante, — à moins toutefois que toute énergie existante ait eu une subite origine à l’instant même de la création. Cela nous est totalement incompréhensible, et nous sommes réduits à chercher s’il existe des conditions où le principe de Clausius sur l’entropie ne serait pas applicable.

Le célèbre physicien écossais Maxwell a imaginé un cas de ce genre, que voici. Supposons qu’un récipient donné soit rempli d’un gaz de température égale dans toutes ses parties. Il est séparé en deux espaces intérieurs par une cloison. Dans cette cloison, il a été pratiqué une série de très petites ouvertures telles qu’une seule molécule gazeuse puisse la traverser à la fois. Chaque ouverture est supposée soumise à la garde d’un petit être intelligent, qui a pour fonction de laisser passer dans un sens toutes les molécules animées d’une vitesse plus grande que la vitesse moyenne de la totalité. Par contre, toutes celles dont la vitesse est inférieure à cette moyenne, ne sont admises que dans l’autre sens. Une soupape empêche le passage de toutes celles qui ne répondent pas à ces conditions. Il arrivera donc que toutes les molécules animées d’une grande vitesse seront réunies dans l’un des compartiments, toutes celles à vitesse faible se trouveront dans l’autre. — En d’autres mots, il passe de la chaleur (car c’est en cela que consiste le mouvement des molécules) d’un des côtés, qui se refroidira constamment, à l’autre côté qui se réchauffera d’une façon continue. Il est évident que celui-ci sera plus chaud que le premier.

    atomique. La matière est également répandue d’une façon uniforme. Il n’existe plus aucune différenciation locale ou quelconque. C’est donc, en un mot, la mort de l’univers par l’inertie absolue et générale.