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ADAM

Rvo, seur, j’ai ja plusieurs joui-s
vescu on ce siècle présent,
ou mon ])cchô m’a fait présent
(le tant ilo peine et tant irenconihro
1*40 que Dieu seul en oongnoist le nombre ;
m(>s puisqu’il plaist a sa clémence,
j’ay tout porte on patience,
le plu» doulccment que j’ay peu.
Nous avons plusieurs enflans eu,
|1U5 filz et filles, grant multitude ;
mette/, tousjours bien vostre estude
a les duyre et les asservir
principaulment a Dieu servir
honorablement sans reproche.
H50 Je sçay bien que ma fin approche,
et ne puis mes longuement vivre ;
je prie a Dieu qu’il me délivre
des misères de cestuy monde,
car tant de misère y habonde,
1455 que le plus vivre me desplaist.

EVE

Cher époux, je vois bien que c’est ;
vous vivez tout desplaisamment,
et fault dire qu’aucunement
vous ayez chose qui vous griefve.

ADAM

Ghere seur, pour sentence briefve,
je ne puis mes maulx oblier ;
je me sens moult affoiblier
pour vieillesse qui fort m’assault.
Je sens bien que mourir me fault
«65 briefmcnt, et payer le truage
a quoy mon vice et mon oultrage
m’a piteusement obligé.

EVE

Vous serez tantost allégé,
cher espoux, ayez espérance :
U70 Dieu par sa liaultaine puissance,
si lui plaist, vous conffortera.

ADAM

Eve, ma fin aiiprochera,
bien le voy et le considère.

SETH

Conmient vous va, mon très cher père ?
1475 Vous me samblcz en petit point.

ADAM

Seth, mon enffant, il ne va point :
vieiliesRo m’a foit affoibly ;
j’ay le |)ovre euour defailly,
et n’a vertu qui no me fuye.
Je suis a la fin do ma vie,
nature n’y peut secourir ;
mes pui^qu’oinsi me fault moui’ir
et passer ce dolant esgard,
j’ay aussi cher tost comme tard ;
mieulx me vault mouiir vistemeut
que languir ainsi longuement.
Je Bçay bien au point que je suis
James liesse avoir ne puis :
je n’y voy point d’aultro remède,
sinon je prie a Dieu qu’il m’aide
et me pardonue le méfiait
dont je congnois que j’ay nieffait
contre sa baulto majesté.

SETH

Las ! père, n’ayez volonté
de nous délaisser si soudain ;
en ce povre règne mondain
avons tant de durs adversaires
que sans vous a tous nos affaires
n’avons qui nous puist confforter.

ADAM

Cher filz, vueillo toy dej^rter
de moy plaindre en ccste manière ;
prie l’ineflable lumière
qu’elle vucille drecier ma voye
et que la fin de mes jours voye
en grâce et bonne confidence.
Noble ot digne estât d’iimocence,
vraye originalle justice,
holas ! bien mauldit fut le vice
qui de toy me deposscssa,
a ceste mort cy m’oppressa
et m’asservist a ce dm’ more ;
par celle ponmie en quoy j’ay moi"s
me rendz a la mort tributaire.

SETH

Las ! mon père, se peust il faire
que mon secours vous puist valoir ?
Tout mon désir et mon povoir
est a vous servir adonné.

ADAM

Mon fJz, il en est ordonné ;
mes pour tant que bon désir as,
je te diray que tu feras :
va t’en et fais tant que l’entrée
do paradis te soit monstree

1450 que ma vie approche B. — 1459 auez B. — 146» serez mnnquf A. — n/u souuei cueur tout B. — 1479 et nay vertu B. — 1483 ce manque A. — 1490 pry a Dieu qui me B. — 1505 et vraje B. — 1518 que A. 1468 serez tnnnque A. — 1470 souueraine B. — 1478 j»y j» !• A. — 1508 pry liofaillaUe