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bon Dieu qui tout sces et tout vois ; 1^0 car se par grâce ne pourvois, aultre remédier n’y peust.

EVE

Las ! mon cher niary, qui vous mcust de tousjours plaindre et doulouzer ? temps est que doyez repposer ; 13to assés avez pris de douleurs et de tristesses en vos jours : faictes ung peu de bonne chère.

ADAM

Helas ! Eve, compaigne chère, jamès bonne chère ne fis 13G0 puis la mort Abel nostre fil/-, ne ne feray, ce croy, jamès : meurdry lut en piteux remetz et livré a mort très austère, et mesmes de son propre frère, 1365 qui est un cas lait et hydeux. Ainsi pour ung en pardons deux : le povre innocent est occis, l’aultre est fuitif par le pays dont jamès nouvelles n’orrons.

EVE

1370 Sire, se Dieu plaist, si ferons, au moins y ay je l’espérance, et desja nous fait demonstrance que nostre dueil est recouvré : Dieu nous a ung beau filz donné, 1375 nommé S( th, comme vous savez ; pourquoy de dueil grant masse avez si n’y prenez aultre confToit.

ADAM

Seth est beau filz, membru et fort, bien moriginé et bien duit, 1380 et bricfment, c’est tout mon déduit et mon plaisir quant le regarde. Je pi’ie Dieu qu’il le nous garde si vray que j’en ay bon mestier. Seth, vien ça, mon filz.

SETH

Volentier, 1383 mon père ; je suis appresté a faire vostre volenté de tout mon povoir, se m’aist Dieux.

ADAM
!Mon cnfi’ant, je deviens fort vieux, 

et ay en la vie mondaine 1390 vescu en traveil et en paine. Neantmoins quoique j’ayc souffert. Dieu m’a tousjours sa grâce ofieit et aydié a tous mes besoings. Si veil que tu notes ces poins : 13^ ayme Dieu de toute ta force et a son service t’ efforce en obédience et cremcur ; aye tes parens en honneur tousjours et en grant reverance ; liOO et Dieu par sa doulce clémence jamès ne te délaissera, ainçois en ton conffort sera jusques en la fin de ton aagc.

SETH

Mon très cher père, si fera je ; 1405 vostre bonne admonicion de toute mou affection veil faire, et tenir vo doctrine.

EVE

C’est pour ton bien qu’il t’endoctrine, mon enffant, tu le peux congnoistre ; 1410 Dieu te doint eu vertus accroistre, si vrayment que je le désire.

CAYN

Je me deromps, je me dessire et souffre tous les maulx du monde : je prie a Dieu qu’il me confonde 1415 briefment et ma vie termine, affin que ma misère fine ou mon vice m’a obligé. Que n’as tu mon cours abrégé. Dieu, et pourquoy me signas tu 1420 pour avoir tant de raaulx sentu que j’ay jusqu’à l’eure présente ? J’ay ja des cuffans vingt ou trente, mal endoctrinés, mal conduis ; je les ay si mal introduis 1425 qu’ilz font de très mauvais ouvrage : je double bien on mon courage que la grand faulte que je fis, quand Abel mon frère deffis et le meurdris villainement, 1430 ne descende présentement sur moy et toute ma famille. J’ay voulu des fois plus do mille moy occh’o par desespoir ; et bien brief le feray, espoir, 1435 se Dieu ne m’abrège mon cours. 1350 se manque A. — 1352 Ha B. — 1356 tristesse A. H. — 1383 si bien A. — 1384 sa A. ^— 1408 qui A. — 1411 si voirement que le désire B. — 1418 cueur A, B. cf. 1435. 1407 veil croire B,