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QUELQUES POÈTES

manquer d’y puiser de grandes lumières pour leur double ministère d’explication et de jugement des œuvres.

Quant à la métaphore biologique, que l’on veut opposer, de l’être qui se suffit à lui-même, une fois détaché de sa souche originelle, elle se retourne directement contre la thèse de ses auteurs. Quel meilleur moyen, en effet, de se rendre compte de cet être que de le rapporter à cette souche même ? Ainsi, un enfant a tel trait caractéristique dans le visage ou le caractère : simple constatation. Sa mère ou un oncle ou un aïeul offre la même particularité, et voilà l’explication, qui permet de voir à quelle race ancestrale il doit cet héritage, et même de juger, au besoin, la juste atténuation de responsabilité dont doit bénéficier telle ou telle tendance morale. L’on devine tout le parti qui peut se tirer d’un procédé du même genre pour pénétrer une nature d’artiste.


C’est trahir, dit-on encore, et rabaisser un auteur que d’introduire dans la critique littéraire des explications biographiques. Un proverbe français, commun, mais expressif, déclare : « Il n’y a pas de grand homme pour son valet de chambre. » Vous ôtez ainsi, à coup sûr, du nimbe et de l’auréole qui se posent naturellement autour du chef de ceux que nous connaissons uniquement par des manifestations intellectuelles, si vous étudiez « la physiologie » de l’écrivain. — Le fait est certain, mais le mal est-il si grand de