Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/37

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
19
LA MÉTHODE DE CRITIQUE LITTÉRAIRE

Avant le dix-neuvième siècle, elle se contentait de juger et de confronter chaque œuvre avec les règles esthétiques qui, dogmatiquement, s’imposaient au genre correspondant. Traitant un ouvrage tout comme un bolide qui aurait chu du ciel, elle s’exposait à des lacunes et à des méprises étranges, en ne tenant quasi aucun compte des circonstances qui l’avaient vu naître, des influences qu’il avait subies. Mais, il y a près d’un siècle, la critique littéraire ne se satisfit plus à aussi bon compte : appliquant, elle aussi, la méthode des « sources », elle se proposa le plus souvent de remonter aux sources naturelles de chaque écrit, en un mot d’expliquer avant de juger, ce qui lui permettait de juger, après ce long travail préalable, beaucoup plus équitablement l’originalité de l’écrivain : tel un magistrat, en face d’un prévenu, cherche d’abord à sonder la genèse et les mobiles de l’acte et mesure ainsi plus exactement, avant de la traduire dans un arrêt, la responsabilité morale de l’homme. Pour être vrai, il convient de reconnaître que, souvent, la critique du siècle dernier, curieuse de tout, même de ce qui n’offrait pas une grande valeur proprement esthétique, a tendu, par réaction, à s’absorber dans la tâche de l’explication pour faillir un peu au ministère du jugement, notamment du jugement moral.

Les sources propres d’une œuvre se trouvent manifestement dans l’époque, les circonstances où elle s’est produite, les empreintes qui ont marqué sur elle, le tour que lui a conféré son auteur, en