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QUELQUES POÈTES

Triboulet, les Quasimodo ou les Jean Valjean. Le roman rivalisa avec la poésie : Balzac et Flaubert nous intéressèrent aux âmes, fort médiocres en somme, des Birotteau et des Bovary, leurs successeurs nous touchent par l’histoire si simple des « frères Yves » et des « bonnes Perrettes » ; il se fit donc une universelle démocratisation des personnages qui retiennent l’attention de la foule.

Dans le monde qui pense, la féconde méthode de l’évolution est venue encourager cette tendance, en prouvant que les humbles cas sont instructifs et figurent comme les maillons serrés de la grande chaîne progressive des mouvements d’idées.

En même temps, par suite de la chute des douanes intérieures de la société, et du progrès matériel des communications, les hommes se trouvèrent rapprochés ; la sympathie, qui n’est que la consonnance des sensibilités, s’en accrut, et le sentiment de la solidarité sociale et humaine se développa dans une ample mesure[1].

En conséquence, il n’est pas une vie d’homme, quelle qu’elle soit, qui n’attire un peu de notre curiosité et beaucoup de notre sympathie. C’est même en définitive l’objet qui attire par excellence, nous voulons dire le plus de personnes, et chacun de nous le plus immédiatement. Sans

  1. Cf. Sully Prudhomme, La vraie Religion selon Pascal, 1905 « … Le progrès de la sympathie dans les foyers conscients et aimants qu’elle allume, oblige à reconnaître le principe d’une victoire évolutive, lente mais constante, du mieux sur l’état précédent ».