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Parmi toutes les pièces du recueil, celle dont s’inspira le plus notre poète est évidemment l’ode de Desportes : c’est donc la seule que nous examinerons avec plus de détails.

Racan avait été élevé dans le mépris de Desportes et il avait vu couvrir d’un Commentaire impitoyable les marges de ses œuvres. Malgré tout il ressentait une secrète sympathie pour la nature du charmant poète, amoureuse et nonchalante un peu comme la sienne propre, et il le lisait avec plaisir, parfois avec délices. Ainsi il goûtait profondément dans le petit recueil l’ode de Desportes Sur les Plaisirs de la Vie rustique, en dépit des critiques rigoureuses dont il l’avait vu cribler par Malherbe et que l’on peut lire encore au cours du Commentaire. Nous mettons sous les yeux du lecteur quelques strophes de cette pièce, qui est en définitive la vraie source des Stances sur la Retraite[1].

 
1. Ô bienheureux qui peut passer sa vie
entre les siens, franc de haine et d’envie,
parmi les champs, les forêts et les bois,
loin du tumulte et du bruit populaire,
et qui ne vend sa liberté pour plaire
aux passions des princes et des rois.

. . . . . . . . . . . . . . .

 
3. Il ne frémit, quand la mer courroucée
enfle ses flots, contrairement poussée
des vents émus, soufflant horriblement ;

  1. On la trouve en entier dans les Œuvres de Philippe Desportes, édition Alfred Michiels. Paris, Delahays, 1858, p. 431, où elle est intitulée Chanson de Bergers.