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QUELQUES POÈTES

salles du haut étaient consacrées à serrer les fruits et les graines ; dans un coin, un appentis garni de paille, où les pommes mûrissent. Plus loin, une porte, maintenant bouchée, conduisait manifestement à la tribune de la chapelle. Ces murailles plusieurs fois séculaires ont été récemment lézardées par la foudre, qui n’a pas encore réussi à les jeter à bas.

Je me pris à songer que ce fut évidemment dans l’une de ces quatre pièces que, le 5 février 1589, il y a plus de trois cents ans, résonna le premier cri du jeune Honorat de Bueil, qui devait être le poète Racan.

Il naissait dans une grande famille, j’entends par là une famille de haute noblesse, qui, pendant plusieurs siècles, prodigua son sang aux côtés du roi, en luttant contre tous les ennemis de la patrie, et la race des Bueil, qui malheureusement n’a plus de descendants mâles, mériterait par ses glorieux états de service d’être aujourd’hui plus connue et honorée : j’avoue que l’étude de cette noble maison fut pour moi l’un des principaux attraits d’un travail sur Racan. Pendant la lutte séculaire que l’Angleterre soutint contre nous, lorsque, ne pouvant encore convoiter nos colonies, elle enviait notre pays même, les Bueil donnèrent leur vie sans compter : ainsi, au désastre d’Azincourt, périrent seize chevaliers de