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herbe, sans se croire obligé de mettre en tête le texte des historiettes de Racan ; au point que le meilleur éditeur moderne les publia, il y a une quarantaine d’années, sous le titre excessif de Vie de Malherbe par Racan, et naguère, à propos de deux thèses de doctorat, à la Sorbonne et dans les revues savantes, l’on a rouvert le feu sur le caractère et sur le génie de Malherbe, en cherchant de part et d’autre des munitions dans les Mémoires de Racan[1].

Une seule note détonne dans ce concert d’approbation vraiment extraordinaire : au milieu du 18e siècle l’abbé Jolly, en son Dictionnaire de littérature et d’histoire, se scandalisait de l’ouvrage et, se refusant à douter du tact de Racan, en contestait l’authenticité : « Est-il à présumer, dit-il, que Racan, le disciple, l’ami, le fils de Malherbe, pour ainsi dire, se soit plu à déshonorer de gayeté de cœur la mémoire de son Maître… ? Quelle indiscrétion dans Racan, pour ne rien dire de plus, s’il est l’auteur de cet écrit ! »

Quelle indiscrétion ! c’est : quelle naïveté ! qu’il convient de dire. Il faut avoir suivi, comme nous l’avons fait, pas à pas, l’invraisemblable naïveté que garda Racan pendant quatre-vingts ans, pour arriver à comprendre comment il la put pousser jusqu’à cette extrémité.

  1. À propos des thèses de MM. Ferdinand Brunot et Gustave Allais (1891).