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content et quelque peu gouailleur à l’endroit de ces enragés de Parisiens.

On entendit même des soldats exprimer leur joie à haute voix, s’écrier ; « Qu’ils se f… pas mal de la France et des Français, et que, ma foi, ils ne demandaient pas mieux que d’aller prisonniers en Allemagne, où l’on buvait, disait-on, d’excellente bière[1]. »

Tel était le résultat de la propagande faite par les officiers bonapartistes auprès de leurs hommes.

Je ne prétends pas que tous les soldats en fussent tombés à ce degré de cynisme et de démoralisation : mais, de cette paix conclue, l’ensemble n’éprouvait visiblement qu’une immense satisfaction.

C’était bien la graine de l’armée future de Versailles !

D’ailleurs, cela ne dura pas longtemps ! La population leur donna de telles leçons, et leur infligea même de telles corrections… manuelles, lorsqu’ils poussaient l’impudeur trop loin, qu’en huit jours elle les eut mis au pas.

La semaine ne s’était pas écoulée que les soldats avaient remplacé leur air provocateur par un air fort penaud et passablement embarrassé[2].

  1. Ceci est textuel. J’affirme avoir moi-même entendu ces propos, comme d’ailleurs tous ceux que je cite dans ce travail.
  2. Il y avait cependant, parmi cette armée, quelques braves garçons qui, d’instinct partageaient les angoisses patriotiques de Paris, et n’eussent demandé qu’à faire leur devoir. J’en logeai moi-même un, pauvre mineur de Fourchambault, entré dans les chasseurs à pied. Mais celui-là, comme tous ceux qui avaient conservé le sentiment de l’honneur et l’amour de la patrie, se plaignait hautement de la trahison des chefs, et racontait, à ce sujet, une foule de détails caractéristiques que je ne puis rapporter ici.