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la plupart d’entre nous, il y avait, à ce moment, plus de désespoir que de foi.

Toutefois, nous crûmes de notre devoir de protester jusqu’à la dernière heure et de tenter un dernier effort, faisant de bon cœur le sacrifice de nos personnalités, devenues odieuses ou ridicules en cas d’insuccès devant les Prussiens.

On peut se demander, néanmoins, si la partie était absolument désespérée, et si nous n’avions pas quelque droit d’agir ainsi que nous le faisions.

D’abord, nous avions lieu de croire[1] que les approvisionnements de Paris n’étaient pas aussi complètement épuisés qu’on l’affirmait.

Des hommes en mesure de le savoir, déclaraient sous le manteau qu’il y avait des vivres pour un mois ou deux, et, avec quelques semaines devant nous, il devenait possible de tenter un grand coup[2].

D’autre part, Chanzy, consulté à la même époque par Gambetta, répondait ceci :

« — Je puis encore me faire battre pendant six mois. »

  1. Après le 18 mars, quand la manutention du quai de Billy et toutes ses annexes dans Paris furent occupées au nom de la Commune, on trouva des quantités énormes de farine, de froment, pommes de riz, salaisons, etc., etc., de quoi nourrir toute la population parisienne pendant un temps relativement considérable. — Ces approvisionnements, malgré l’incurie du gouvernement de la Défense nationale, qui en avait laissé pourrir une grande partie, suffirent, et au delà, à l’entretien de la garde nationale fédérée, pendant les deux mois que dura la Commune.

    Il fut constaté également que la plus grande masse des vivres envoyés par l’Angleterre à la population parisienne à la suite de l’armistice, étaient restés dans les magasins de l’État.

    Nous pourrions invoquer, au besoin le témoignage de centaines de personnes qui ont constaté ces faits et sont prêtes à les certifier.

  2. Tout le monde savait, d’ailleurs, qu’il y avait dans Paris, chez les particuliers, des quantités de vivres cachés pour faire la hausse et qu’on eût pu rendre à la circulation par de sévères réquisitions, qui eussent été le strict devoir du gouvernement officiel au milieu des circonstances où nous nous débattions.