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Le bombardement n’eut donc d’autre effet que de rendre les journaux plus intéressants, d’offrir aux Parisiens un spectacle sur lequel ils n’étaient point blasés, et de créer une industrie aux gamins de Paris qui couraient après les projectiles, pour les revendre ensuite aux amateurs.

Trochu n’avait pas de chance !

Du reste, cette gaieté, que blâment les imbéciles qui prennent la gravité pour de la profondeur et la lourdeur pour du génie, oubliant que les animaux les plus stupides, tels que le bœuf, sont les plus graves, cette gaieté est un des caractères marquants de l’esprit français.

Les Parisiens, notamment, en donnèrent de charmants, je dirai même d’admirables exemples. La gaieté ajoute à la bravoure quelque chose d’aimable, qui en rehausse l’attrait, et le devoir austère accompli le sourire aux lèvres se revêt de grâce, sans rien perdre de sa grandeur.

Fi des vertus maussades ! On y sent trop l’effort, qui gâte tout. Ce ne sont que des demi-vertus.

Qu’on appelle tant qu’on voudra légèreté cet héroïsme riant. N’est-ce pas grâce à cette heureuse légèreté que ce peuple franchit les siècles d’un bond, et marque, au loin, l’étape où devra, désormais, passer l’humanité ?

S’il tombe, c’est qu’il court, c’est qu’il vole. Vous qui rampez, vous ne connaîtrez jamais ses chutes, mais aussi trouveriez-vous votre chemin, s’il ne le traçait devant vous, éviteriez-vous les abîmes, s’il ne les rougissait de son sang intarissable ?

Ces fédérés indomptables qui moururent sans une faiblesse sous les balles versaillaises, que de fois je les ai vus, pendant le siège, pour charmer leur inaction, jouer au bouchon sur les remparts