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énervant, plus contraire à son tempérament d’action que les plus cruels malheurs, Trochu annonça d’un air triomphant que les Prussiens allaient enfin commencer le bombardement, ce fut presque une joie dans Paris.

Le bombardement, c’était du nouveau, de l’action… en sens contraire, mais de l’action.

Ce fut à la mairie du neuvième arrondissement que je lus cette affiche. Il y avait là un rassemblement.

Ils vont nous bombarder, s’écria un ouvrier ; allons ! tant mieux ! Ça nous réchauffera ![1]

Et la foule se mit à rire.

Les Allemands, qui comptaient sur le moment psychologique, ne connaissent pas les Français.

Le bombardement fut, en effet, bien reçu par la population parisienne. On ne voulait pas la mener aux coups, les coups venaient à elle : qu’ils soient les bienvenus.

On vit alors ce spectacle singulier d’une population, hommes, femmes, enfants, qu’il fallait supplier de ne pas courir après les obus et de ne pas se rassembler dans les quartiers bombardés.

Les habitants de ces quartiers ne voulaient pas déménager, et ne quittaient leur maison qu’alors qu’elle était éventrée. Encore y en avait-il qui restaient là.

Les queues à la porte des boulangeries, composées exclusivement de femmes, ne bronchaient pas sous la mitraille.

Les obus tombaient à quelques pas. Personne ne bougeait.

— Tiens, les Prussiens qui nous envoient des prunes, disait-on ; et l’on riait encore.

  1. Textuel.