Page:Arnould - Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, v1.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ils restaient immobiles, la figure sombre, le regard irrité, et semblaient solliciter de leurs officiers l’ordre de charger.

Les soldats de la ligne fraternisaient franchement avec le peuple. Mais qu’on ne se fasse pas d’illusion à ce sujet. Il n’y avait là ni souffle révolutionnaire, ni même patriotisme. Ils espéraient seulement que la fin de la guerre allait sortir de la chute de l’Empire.

Quant aux soldats de la garde impériale qui occupaient les portes des Tuileries, partout sur notre passage, ils présentaient les armes à la garde nationale insurgée[1].

Malheureusement la foule oscillait de droite et de gauche, allant où son caprice et le hasard dé ses impressions la poussaient, sans direction, sans boussole, sans plan, ne songeant pas même à marcher sur la préfecture de police, à s’emparer de ce repaire de bonapartistes, avant que les gens intéressés à cette besogne eussent le loisir de faire disparaître un grand nombre de pièces qu’il était de la plus haute importance, pour le parti républicain, d’avoir en sa possession.

Je sentis là, une fois de plus, combien il est dangereux pour un parti de n’avoir aucune organisation.

En effet, depuis le coup d’État, le parti démocratique était complètement désorganisé. Nul lien n’en reliait les tronçons séparés.

Il y avait des centres actifs, des individualités énergiques ; mais aucun mot d’ordre commun.

  1. Un fait qu’il faut signaler, parce qu’il a son côté de gaieté, c’est qu’un Turco nègre, grimpé sur un arbre du quai de la Conférence, agitait son turban dénoué, et acclamait la garde nationale, en poussant des cris gutturaux du plus comique effet.