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A partir du 4 septembre, la police avait disparu des rues. Le zèle, l’honnêteté, la surveillance volontaire des citoyens la remplaçaient. Or, pendant ces cinq mois, Paris avait joui d’une tranquillité sans exemple. Pas un délit contre les personnes, pas un délit contre les propriétés.

Jamais on n’avait vu les rues aussi sûres. A toute heure de la nuit comme du jour, on pouvait traverser avec assurance les quartiers les plus déserts, les plus mal famés en temps ordinaire. Même une femme seule se fût promenée à travers Paris entier, aux heures les plus indues, qu’elle n’eût pas été exposée à la moindre insulte.

Et cependant quelle horrible misère ! La famine régnait, la population prise en masse, manquait de tout.

Au milieu de ses angoisses patriotiques et de ses souffrances multiples, le peuple de Paris venait donc de jouir d’une liberté réelle, complète, universelle, qu’il n’avait jamais connue, et, tout en en jouissant, il sentait que ce n’était là qu’une tolérance qu’on pouvait lui retirer d’une seconde à l’autre.

Pourquoi cela ? de quel droit ?

Il s’en était montré digne. Le hasard des circonstances avait permis de tenter une vaste et décisive expérience, et de cette expérience, le peuple de Paris était sorti victorieux, converti à ses propres yeux.

Nul doute possible ! Ce peuple se montrait | mûr pour toutes les libertés, pour toutes les réformes. La preuve en était palpable pour lui-même et pour le monde.

Sans transition, brusquement, par le seul fait de sa supériorité morale, de sa culture intellectuelle, on le trouvait prêt à supporter un régime