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Jules Favre avait concédée au roi de Prusse.

Cependant, la tension morale me semblait si grave, et l’attitude de la population avait pris un tel caractère, qu’il me parut impossible qu’on ne comptât pas à Bordeaux avec ce nouvel élément de la situation politique.

Le gouvernement absent se faisait renseigner par ses agents, mais il gardait, ou dénaturait de la façon la plus infâme les renseignements parvenus jusqu’à lui.

Quant à l’Assemblée, elle était loin, et, quelque méprisable qu’elle fût, on pouvait supposer que la connaissance exacte de la vérité agirait sur elle.

On ne savait pas encore qu’elle était irrévocablement décidée à la guerre civile, qu’elle l’attendait avec impatience, qu’elle avait froidement condamné à mort, dans le sens strict et matériel du mot, l’héroïque garde nationale de Paris, pour la punir d’avoir voulu sauver la France et d’avoir sauvé l’honneur de la République.

D’autre part, les chefs du parti démocratique étaient presque tous à Bordeaux, où ils siégeaient sur les bancs de la gauche.

On ignorait également que ces hommes, qui avaient vécu à Paris pendant le siège, qui avaient vu la courageuse abnégation de la population et touché du doigt les infamies, les trahisons du gouvernement du 4 septembre, trahissant aussi leur mandat, étaient prêts à se mettre du côté de l’Assemblée contre Paris, étaient capables, deux mois plus tard, dans le sang jusqu’aux aisselles, de voter des remercîments aux égorgeurs versaillais.

Sans croire outre mesure à ces représentants de la gauche, il y a un degré de turpitude auquel on ne suppose pas que des hommes, même