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Rien, en effet, ne peut rendre compte du néant moral et intellectuel de ces paysans qu’on arrache ignorants à leur charrue, pour les soumettre au régime immoral et stupéfiant de la caserne.

Sur ce sauvageon, auquel nulle culture n’a fait pousser de fruits, la discipline militaire à greffé l’idiotisme et l’avilissement.

Pour en faire une bête féroce, il ne manque plus que l’odeur de la poudre, la peur et quelques verres d’eau-de-vie[1].

Les marins, aussi peu instruits, aussi dominés par la discipline, montrèrent cependant une certaine supériorité intellectuelle.

Ils se mêlèrent davantage au mouvement.

Il y a chez eux un côté de fantaisie et une habitude de voir des choses nouvelles, qui les préparent à accepter avec une joie enfantine la nouveauté ! Ils la comprennent mieux ; ils ont l’esprit plus ouvert.

L’inquiétude générale, en ce moment, dans Paris, était la crainte de quelque collision entre la garde nationale et les Prussiens.

Une ou plusieurs mains inconnues avaient couvert d’un crêpe noir le visage des statues de pierre qui, sur la place de la Concorde, représentent les principales villes de France, idée touchante et poétique, comme en trouve à la fois ce grand artiste dont le nom est à la fois Personne et Tout le Monde.

Dans les faubourgs, on paraissait résolu à recevoir les Prussiens à coups de fusil, quoique le moment fût passé de tenter cette résistance dés-

  1. On a pu le constater cent fois, notamment en décembre 1851 et en mai 1871.