Page:Arnould - Anecdotes inédites sur Malherbe, 1893.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 33 —

ADDITION I (P. 213-214). Elle se place après « … il ne s’estoit point aperçu qu’elle se fust enlevée hors de sa place » (Mém., p. Lxxi, au bas.)

Les premiers vers de Malherbe.

Anecdote 1. (P.213.)

Ses premiers vers estojent aussi mauvais, que les autres ont esté bons. Il fit une Élégie, estant encore fort jeune, sur la mort d’une fort belle fille, qui estoit sa Parente, laquelle commençoit ainsi,

Donques tu ne vis plus, Geneviève, et la mort, etc. Mais ayant leu les ouvrages des bons Poëtes, et profité de la conversation de plusieurs de ses Compatriotes, qui faisoyent fort bien des vers, il changea bientost de style, et ne se contenta pas de les égaler, mais il les surpassa tous en la beauté de l’expression, et en la manière de bien tourner les vers, comme ils l’avouöyent eux-mesmes. Ce changement parut en un (sic) Épitaphe qu’il fit pour un de ses oncles, frère de sa mère, nommé M. d’Is, Lieutenant criminel à Caen. Comme c’estoitun homme de réputation dans la ville, et fort considéré dans sa famille, la Mère de M. de Malherbe l’avoit pressé plusieurs fois de faire des vers sur sa mort ; de sorte que pour se délivrer de ceste importunité, il fit en fin ce Sizain, comme par dépit :

Icy dessous gist Monsieur d’Is,
Pleustor à Dieu qu’ils fussent dix.
Mes trois Sœurs, mon Père et ma Mère,
Le grand Eléazar mon Frère,
Mes trois Tantes et monsieur d’Is ;
Vous les nommé-je pas tous dix ?

Malherbe