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Allait t’unir au sort de ton fidèle amant,
J’étais loin de prévoir cet affreux changement,
Près de toi je gémis, et tu ne peux m’entendre ;
Et ton corps, à mes yeux, n’offre qu’un peu de cendre,
Ce tombeau que je viens inonder de mes pleurs,
Rappelle à chaque instant mes horribles malheurs.
Florella, c’en est fait… je le sens… je succombe :
Reçois-moi dans tes bras, j’expire sur ta tombe. »
Qui que tu sois, ô toi ! mortel trop malheureux,
Ah ! tu n’es pas le seul qui gémisse en ces lieux.
Tu pleures le trépas d’une amante fidèle ;
Comme toi je succombe à ma douleur mortelle ;
Chaque jour je languis, je déplore mon sort ;
Il ne me reste plus d’autre espoir que la mort…
Viens trop cruelle Aminte, en voyant ma souffrance,
Jouis, elle est le fruit de ton indifférence,
Je t’aime, tu me hais, tu t’éloignes de moi ;
Penses-tu que je puisse exister loin de toi ?
Tu l’ordonnes, barbare ; il faut que je t’oublie ;
Ordonne mon trépas, tu seras obéie…
Oui, j’ai lu dans ton cœur cet arrêt foudroyant ;
C’est toi qui l’as dicté, viens me voir expirant.
C’est trop longtemps souffrir, ma mort est ton ouvrage.
Je vois devant mes yeux se former un nuage.
Dieux ! pour moi du néant les portes vont s’ouvrir :
Daigne d’un malheureux garder le souvenir,
Aminte… je le sens… la force m’abandonne :
J’expire sous tes coups, mais mon cœur te pardonne.

A. Dépierris.