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« Messieurs,

» L’Université doit aussi un tribut d’éloges et de regrets à l’homme immortel dont nous accompagnons ici les restes. M. Delille rivalisait de droit avec nos plus anciens professeurs par la durée de ses services, et dans leur éclat n’était rivalisé par personne. Les moyens qui faisaient sa gloire dans l’Institut doublaient de valeur dans l’Université, où il fournissait à la fois des leçons et des exemples, et à laquelle il appartint presque en naissant ; dans l’Université qu’il étonna pendant plus de soixante-ans, soit comme élève, soit comme maître, et qui, par cela même qu’elle fait une perle plus grande que tout autre corps littéraire, doit trouver plus difficilement les termes propres à faire connaître toute l’étendue de sa douleur.

» Mais que me reste-t-il à dire, à moi qui me fais ici l’organe de ce corps illustre ? que me reste-t-il à dire pour peindre ce que nous éprouvons sur les bords de cette tombe qui n’engloutit pas tout ?

» Les orateurs que vous venez d’entendre n’ont-ils pas développé ce que nous pensons ? et ce que nous sentons n’est-il pas encore plus éloquemment exprimé par ces sanglots qui couvrent ma voix, par ces larmes qui se confondent aux miennes ?

M. Le Dieu, étudiant en droit, l’un des élèves de M. Delille, s’est alors présenté et a obtenu la permission de prononcer le discours suivant :

» Souffrez que la jeunesse s’approche aussi de la tombe d’un grand homme, et qu’elle y vienne épancher sa douleur. Permettez-lui d’y déposer, après vous, l’hommage de sa reconnaissance et de ses regrets. C’est sur-tout à l’âge du sentiment à louer et à pleurer le poëte du sentiment.

» Cette qualification, qui la mérita mieux que M. Delille ? Relisez ses chefs-d’œuvre et ses nombreux ouvrages ; dans chacune de leurs pages, vous retrouverez ses titres humides encore des larmes qu’ils ont arrachées à vos yeux. Là, tou-