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J’ai vu les feux sanglants s’allumer sur les môles,
Et j’ai senti glisser le long de mes épaules,
Comme un manteau trop lourd, tissé de pourpre et d’or,
Le désir de la vie… Ô vie, ingrate idole,
Le son doux, caressant et vain de ta parole
Ne me trompera plus, s’il me séduit encor.

Car j’ai compris ce soir quel rêve périssable
C’est de vouloir graver notre nom sur le sable
Que soulèvent les vents accourus du désert ;
Ma pensée, attentive à la voix du silence,
M’a fait une royale et calme indifférence :
Je me suis apaisée en regardant la mer.

Ô mer, avec tes eaux profondes et salées
Et les brillantes fleurs que les nuits étoilées
Te jettent par milliers comme sur un tombeau,
Tu poses sur tes morts aux mains froides et pâles
Un linceul, tout brodé de saphirs et d’opales,
Avec la lune d’or pour unique flambeau.