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Ce travail n’a pas paru dans la Revue philomathique. Mais ma thèse étant combattue par un savant dont l’autorité est considérable dans notre région, et l’auteur l’ayant adressé sous forme de tirage à part à un nombre plus ou moins grand de personnes, il m’a semblé que je ne pouvais pas attendre, pour répondre, la publication du volume de l’Académie de Bordeaux.

Ma thèse est connue des lecteurs de cette Revue par la réfutation qu’en a essayée M. Strowski, et par la réponse que je lui ai faite[1]. Je crois avoir établi : 1o que le Discours de la Servitude volontaire[2], contient des allusions à Henri III qui devint roi de France vingt-six ans après la mort de La Boétie, que le texte en a donc été remanié par une main étrangère pour en faire une satire contre les auteurs de la Saint-Barthélémy et contre Henri III ; 2o que cette main est vraisemblablement celle de Montaigne, ami intime de La Boétie et héritier du manuscrit.

En attribuant à Montaigne une entente secrète avec les protestants pour la publication du Contr’un et une part notable dans sa composition, je pense avoir servi sa mémoire. M. Dezeimeris, qui s’indigne contre cette proposition, n’a pas essayé de la réfuter, comme l’ont tenté mes précédents contradicteurs. Il ne met en discussion que la première partie de ma thèse, et encore n’argumente-t-il pas directement contre elle. Il veut simplement prouver que le Discours « ne vise nullement Henri III ». Se dispensant[3] d’examiner les raisons que j’ai données pour établir les allusions qui désignent ce roi, il espère faire cette preuve par le procédé que nous appelons en médecine la méthode substitutive : le tyran du Contr’un ne peut pas être Henri III parce que c’est Charles VI.

M. Dezeimeris est d’avis — ici son opinion ne diffère pas de la mienne — que le Contr’un n’est pas une déclamation, un

  1. Revue philomathique de février, mai et juillet 1907.
  2. Le discours de la Servitude volontaire est souvent désigné sous le nom de Le Contr’un, sous lequel, dit Montaigne, il fut rebaptisé. J’emploierai souvent cette appellation.
  3. Sauf sur un seul point : la question des tournois, qu’il ne vise qu’indirectement dans une note que je discuterai plus loin.