son effroyable recherche. Une lettre de son fils vint heureusement, quelques jours après, le tirer de son angoisse. À notre arrivée à Gand, nous fûmes littéralement enlevés, en descendant de chemin de fer, par un négociant, M. Alphonse Janssen, Français de cœur, qui avait servi dans la légion étrangère et fait la campagne de Crimée. Il nous ouvrit sa maison, nous admit dans sa famille : sa franche et cordiale hospitalité est restée dans notre cœur comme l’un de nos meilleurs et de nos plus doux souvenirs. Son père, vieillard de quatre-vingts ans, vert et alerte comme un jeune homme, avait fait la campagne de Russie et les campagnes de France. Nos désastres le faisaient fondre en larmes.
Au lendemain de Sedan nous croyions que tout était fini et que la paix ne tarderait pas à se conclure. Notre épuisement d’ailleurs ne nous permettait pas de songer à rentrer immédiatement en France et nous dûmes passer en Belgique, prisonniers, prisonniers sur parole, tout le temps qui s’écoula jusqu’à la fin de la guerre. Nous suivions ses péripéties avec une anxiété poignante dans les journaux français et étrangers que l’hospitalité gantoise avait mis à notre disposition en nous ouvrant gracieusement l’entrée des deux meilleurs cercles de la ville. Chaque jour nous venions, le matin et le soir, chercher les nouvelles et savoir où en était la fortune de la France. La Prusse était-elle décidée à poursuivre impitoyablement sa victoire ? l’Europe nous laisserait-elle écraser ? En cas d’une lutte suprême, le peuple français se lèverait-il tout entier pour défendre l’intégrité de son territoire, et ses efforts seraient-ils couronnés de succès ?
Et à mesure que les jours s’écoulaient, nous voyions le roi de Prusse, oublieux d’une parole solennellement