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III.

Il en est qui prétendent, les philosophes de Mégare[1] par exemple, qu’il n’y a puissance que lorsqu’il y a acte, que lorsqu’il n’y a pas acte, il n’y a pas puissance : ainsi celui qui ne construit point, n’a pas le pouvoir de construire, mais celui qui construit a ce pouvoir quand il construit ; et de même pour tout le reste. Il n’est pas difficile de voir les conséquences absurdes de ce principe. Évidemment alors on ne sera pas constructeur si l’on ne construit pas ; car l’essence du constructeur c’est d’avoir le pouvoir de construire. De même pour les autres arts. Il est impossible de posséder un art sans l’avoir appris, sans qu’on nous l’ait transmis, de ne plus le posséder ensuite sans l’avoir perdu (on le perd ou en l’oubliant, ou par quelque circonstance, ou par l’effet du temps ; car je ne parle point du cas de la destruction du sujet sur lequel l’art opère : dans cette hypothèse même l’art subsiste toujours[2]. Or, si l’on cesse d’agir, on ne

  1. C’est l’École qu’on a appelée éristique, et dont Euclide, disciple de Parménide et de Socrate, fut le fondateur.
  2. Le texte : οὐ γὰρ δὴ τοῦ γε πράγματος φθαρέντος· ἀεὶ γάρ ἐστιν. Cette phrase elliptique est expliquée ainsi par Alexandre, Sepulv., p. 233 : « Quod vero ait : Non enim re abolita hujusmodi est. Tunc contingit ut ars non habeatur cum oblivione, tempore aut morbo amittitur ab eo qui habebat, non si res res et materia aboleatur. Si enim lapides